Si vous prenez une pièce de 25 cents, que voyez-vous ? Un caribou, emblème du Nord canadien. Autrefois symbole des grands espaces, le caribou voit aujourd’hui son territoire rapetisser et sa population diminuer. Coupes forestières, développements miniers. L’homme a joué un rôle majeur dans la baisse des troupeaux. Dans la région de Val-d’Or, il ne reste que 18 caribous forestiers. Le gouvernement québécois tente de sauver cette espèce menacée, mais cela ne suffit pas.
Le labo du journalisme scientifique est un blogue tenu par les étudiants du cours de Journalisme scientifique de l’Université Laval.
En 1955, le troupeau de Val-d’Or comptait environ 80 caribous. En 2016, il en restait 18. La population de caribous de Val-d’Or est à très haut risque d’extinction. Depuis une trentaine d’années, le gouvernement met en place des mesures pour sauver les bêtes restantes. Entre autres, le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs (MFFP) a introduit des plans d’aménagement forestier et un contrôle des prédateurs. Pour augmenter le taux de survie des faons, le MFFP a aussi construit des enclos de maternité pour les femelles gestantes. Les Premières Nations de West Moberly et de Saulteau ont pris des mesures similaires. Le troupeau local est passé de 16 caribous à environ 70 en seulement quatre ans.
Pourquoi ces mesures ne fonctionnent-elles pas aussi bien au Québec ? Plusieurs biologistes et écologistes blâment l’échec sur des actions incomplètes. Selon eux, les mesures ne seront efficaces que si le gouvernement contrôle le développement industriel, forestier et minier. Dans la région de Val-d’Or, les coupes forestières ont favorisé la venue de prédateurs. L’abondance de baies et de fourmis a séduit l’ours noir. Les milieux ouverts ont attiré l’orignal. Le loup gris, son prédateur principal, a suivi de près. Malheureusement, les jeunes caribous sont des proies plus faciles que l’orignal. Le loup ne manquera pas sa chance s’ils croisent son chemin.
Un triste constat
Le gouvernement est conscient des mesures à prendre pour sauver la population, mais les considérations économiques l’emportent. Le 8 mars 2018, le MFFP a rendu public son rapport préliminaire sur l’habitat du caribou forestier de Val-d’Or. Pour que la population des caribous de Val-d’Or se rétablisse, le ministère estime qu’une restauration active de l’habitat sur 50 ans est nécessaire. L’investissement est évalué à plus de 76 M$ pour la durée du projet. Ce n’est pas tout. Le rapport estime que les travaux entraîneraient une baisse de près de 1,4 M$ par année dans les revenus du secteur forestier et la perte de 187 emplois directs et indirects.
Le gouvernement ne se risquera pas dans ces gros investissements. La population de caribous forestiers a peu de chances de survivre jusqu’à la fin du projet. Une projection indique que la population déclinerait jusqu’à son extinction d’ici 15 à 20 ans. Le troupeau de caribous forestiers de Val-d’Or est isolé, ce qui rend impossible l’échange avec d’autres populations comme celle de La Sarre.
Encore un espoir
Il est peut-être trop tard pour les caribous forestiers de Val-d’Or, mais pour d’autres troupeaux de caribous menacés, il reste encore une chance. En Gaspésie, la population de caribous montagnards est passée de 189 en 2007, à 75 caribous en 2017. Encore une fois, l’exploitation forestière joue un grand rôle. Les coupes autour du parc national de la Gaspésie ont été favorables aux coyotes qui s’attaquent aux jeunes caribous. Au printemps, un troisième plan de rétablissement pour les caribous montagnards sera proposé. Plusieurs actions seront mises de l’avant pour empêcher une autre espèce de s’éteindre.