« Ma plus grande fierté est d’avoir choisi de bâtir ma vie au lieu de la détruire », raconte Nicolas Legault. Aujourd’hui âgé de 35 ans, le jeune homme a dû traverser de rudes épreuves avant de se rendre compte qu’une attitude positive et persévérante le ferait non seulement raccrocher, mais aussi exceller à l’école.
Originaire de Gatineau, Nicolas Legault a vécu une enfance plutôt douce à faire du sport et à rêver de devenir un jour artiste (son père était guitariste) ou joueur de hockey vedette. Bon élève et jeune garçon en santé se proclamant « antidrogue et anticigarette », il n’aurait jamais cru décrocher de l’école et encore moins tomber un jour dans la toxicomanie.
Fils unique de parents sans diplôme, Nicolas n’a pas pu profiter d’un modèle de réussite scolaire. Un grand frère, par exemple, qui aurait su le motiver à poursuivre ses études lorsque sa vie a pris une tournure plus sombre.
La chute libre
C’est à 16 ans, en 4e secondaire, qu’il « commence à décrocher ». « J’étais encore à l’école, mais je n’avais plus aucune motivation, je n’étais plus intéressé, raconte-t-il. Je me suis mis à manquer et à échouer des cours; cela ne m’était jamais arrivé. Je ne voulais plus aller à l’école. »
L’élément déclencheur? L’intimidation dont il était victime dans son établissement scolaire. En discutant avec ses parents, le trio convient que Nicolas fréquentera l’école aux adultes où il pourra avancer à son rythme et faire de nouvelles connaissances. En revanche, il n’avait pas prévu se lier d’amitié avec des gens plus vieux qui consommaient de la drogue.
« Je les trouvais cool, se souvient-il. Je suis passé du petit gars sportif à quelqu’un qui était attiré vers d’autres types de personnes : des gens qui consommaient, mais qui étaient gentils. Comme je n’étais plus victime d’intimidation, je me suis mis à croire que ce n’était pas la drogue le problème, mais les gens intimidants et méchants. »
Intrigué, le jeune homme commence à fumer de la marijuana vers l’âge de 17 ans. Comme sa première fois est couronnée par l’une des meilleures nuits de sommeil de sa vie, il se met rapidement à en faire la promotion, au point à ne plus parler que de cela.
« J’étais toujours gelé en classe. J’écoutais de la musique, je me couchais sur mon pupitre et je ne suivais plus la matière. Je fumais même avant de jouer au hockey et comme je comptais plus de buts, cela renforçait mon idée que le pot était vraiment bon pour moi. »
Nourrir la bête
Développant une mentalité pessimiste envers le « système (capitaliste) » et le gouvernement, Nicolas avoue être devenu complètement déconnecté de la réalité. Lorsque tout a dérapé, il a décroché de l’école pour se mettre sur l’aide social, travailler un peu au noir et, surtout, continuer à consommer. Il avait 18 ans. Entouré de gens toxiques qui partageaient son aversion pour le « système » et l’école, il a commencé à fumer la cigarette puis « à faire n’importe quoi ».
« Dans le nez, des pilules, de la drogue dure, des injections; j’ai tout fait. J’étais en train de creuser ma tombe. Il n’y avait que deux issus possibles : soit je mourrais d’une overdose, soit j’allais finir en prison. J’étais vraiment en train de détruire ma vie. Tous mes petits rêves comme devenir un artiste ou un joueur de hockey, tout cela n’existait plus. »
Suicidaire, il est passé à deux doigts de la mort à quatre ou cinq reprises en plus de faire quelques séjours en psychiatrie. « Mourir m’était égal, je courais un peu après la mort. Je m’étais simplement mis dans la tête que je ne faisais pas partie de la société. »
La force de dire non
Son meilleur ami de trip étant devenu schizophrène et le prix de la drogue ayant radicalement augmenté, il parvient enfin, un jour, à dire non. « Il a fallu que je redevienne le petit gars que j’étais, que je revienne sur mes pas pour changer ma mentalité afin de pouvoir repartir du bon pied et retourner vers la lumière, dit-il. J’avais besoin d’aide et de soutien pour cela. »
Vers l’âge de 28-29 ans, Nicolas est retourné vivre chez ses parents, loin de la ville. La présence d’enfants vivant à l’étage lui a fait un bien immense, tout comme la rencontre d’une adolescente provenant d’une famille voisine et qui venait parfois les visiter. « Une fille studieuse et sérieuse à qui je dois ma motivation pour retourner à l’école, explique-t-il. Je la voyais sur le bon chemin et chaque fois qu’elle me demandait ce que je faisais de bon, je me rendais compte que je ne faisais rien. C’est elle qui m’a parlé de l’école des adultes près de son école secondaire. »
En 2016, âgé de 29 ans et conscient que sa vie n’allait nulle part, Nicolas a adopté une attitude des plus positives pour reprendre ses études. Il est aussi parvenu à arrêter de consommer. « L’école, c’est un outil pour bâtir sa vie. C’est ce que cette jeune fille m’a mis dans la tête et que j’ai compris. Je suis retourné à l’école en me disant : c’est parti! J’allais d’abord chercher mon diplôme de secondaire, puis rapidement plus rien ne pouvait m’arrêter, il n’y avait plus de limites. »
Le prix de l’excellence
Sa première grande gratification? Une note parfaite qui lui a permis de décrocher son diplôme d’études secondaires. Puis, de nouveaux buts : étudier en environnement, avoir de bonnes notes et se prouver qu’il pouvait réussir. Il a obtenu des bourses grâce à ses professeurs qui l’ont encouragé à participer à des concours.
« À l’école aux adultes, j’ai gagné un prix, cinq bourses et la médaille du Gouverneur général du Canada, dit fièrement celui qui fut le seul étudiant à décrocher la bourse de persévérance en sciences nature au cégep. Je suis sorti de là avec la médaille et plus de 1000$ en poche. C’est là que tu vois que quand tu veux, dans la vie, tu es récompensé par tes efforts. »
Impressionnés par son attitude positive et son cheminement, ses professeurs lui ont ensuite proposé d’aller donner des conférences dans des classes afin de raconter son histoire; ce qu’il a fait en 2018 et 2019, avant la pandémie.
Aujourd’hui, en plus d’offrir du tutorat aux étudiants du primaire et du secondaire, il complète un certificat en rédaction professionnelle et poursuit plusieurs rêves : celui d’acheter un terrain à la campagne, de se construire une maison et de décrocher un emploi gouvernemental « qui lui permettrait d’écrire beaucoup. »
« Depuis que j’ai développé la persévérance, il n’y a plus rien qui va m’arrêter, lance-t-il. Les jeunes doivent comprendre que leur vie leur appartient. Ta vie est entre tes mains. C’est toi qui décides si tu la détruis ou si tu la bâtis. »
[…] texte de Sarah-Émilie Nault publié sur Reflet de Société | Dossier Décrochage et Alcool et […]
[…] First seen in Reflet de Société, Vol. 29, no. 6, août (August) 2021, pages 22 – 23 […]
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