Pour cet éditorial, le rédacteur en chef de Reflet de Société a laissé sa place à sa chef de pupitre, moi-même. Si certains d’entre vous se sont déjà posé la question de ce qu’était un chef de pupitre, sachez que c’est la personne qui coordonne les affaires internes du magazine. Le rédacteur en chef serait un peu comme le premier ministre, tandis que le chef de pupitre serait le secrétaire d’état. Chacun à ses dossiers et parfois nos plates-bandes se rejoignent.
Un texte de Delphine Caubet – Dossier Culture
Et comme à Reflet de Société on ne fait rien comme les autres, le chef de pupitre est recruté par le volet maison d’édition (les Éditions TNT) pour jouer le chef d’orchestre entre les auteurs, l’imprimeur et la foule d’autres partenaires.
Probablement que mon jupon a un peu dépassé par moment et que vous l’avez noté: je suis Française. Du sud de la France (une précision importante pour moi). Je suis arrivée au Québec en 2009 alors que je n’avais que 20 ans et un DEC en poche. J’ai fait mes études universitaires au Québec et c’est quelques années plus tard, fraîchement diplômée, que Raymond Viger et Reflet de Société m’ont embauchée.
Début 2017, pour des raisons administratives et financières, l’organisme effectue plusieurs changements, dont la séparation des Éditions TNT. Elles deviennent une entité à part, administrativement différente de Reflet de Société. Et c’est là que Raymond Viger me propose de devenir présidente de ce nouvel organisme. Bien sûr, je saute sur l’occasion.
Peu de temps après, en épluchant la loi sur le livre (loi provinciale), j’ai découvert un fait qui m’a fait tomber de ma chaise: au Québec pour être un libraire, éditeur ou distributeur agréé, il faut être un citoyen canadien résident au Québec. Même si nous étions plusieurs sur le conseil d’administration et que j’étais la seule avec une résidence permanente, ça ne passe pas. Je dois quitter le conseil d’administration sous peine de ne plus rendre conformes les Éditions TNT à la loi sur le livre.
Cette précision de la loi sur le livre me laisse totalement pantoise. Actuellement, je suis résidente permanente au Canada. Concrètement, c’est l’étape juste avant la citoyenneté. Ça veut dire que je suis éligible pour des subventions, que je peux pas mal tout faire, à part voter.
En étant si restrictif avec sa loi sur le livre, le Québec envoie un message totalement incohérent: c’est d’accord pour te donner de l’argent et t’aider à te trouver un travail, mais si tu veux participer à la vie culturelle de la province et créer ton propre travail dans le milieu du livre (même avec une participation minoritaire), c’est non. Mais cette loi n’exclut pas uniquement les migrants, elle met de côté également les Canadiens non-résidents au Québec.
Datant de 1981, cette loi avait probablement pour objectif de limiter le nombre de parutions en anglais sur le marché québécois. Sauf qu’en 2017, cette loi est devenue archaïque. Grâce à Internet et aux plateformes de livres numériques, du contenu de toutes langues est disponible instantanément. Nous-mêmes, grâce à l’entrepôt numérique avec lequel nous collaborons, rendons nos livres accessibles dans des pays avec qui nous n’avons aucun lien. Des livres de Raymond Viger ont été vendus au Luxembourg alors que nous ne travaillons pas ce marché.
Alors, lorsque l’on compare la rigueur de la loi sur le livre avec la réalité du terrain, la différence est vertigineuse. Nous avons pris contact au printemps dernier avec des élus pour en savoir davantage sur cette loi, et pour peut-être la moderniser. Mais à ce jour, aucune information concluante ne nous a été transmise.
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Le livre a une longue histoire qui passent par les égyptiens, les chinois et tant d’autres qui l’ont fait évoluer. Découvrez son histoire avec l’équipe de C’est pas sorcier.