Le Conseil de presse du Québec: Quand les médias dérapent

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Par Colin McGregor | Dossier Médias

Saviez-vous que si vous trouvez qu’un article de Reflet de Société est faux ou biaisé, vous pouvez vous en plaindre  au Conseil de Presse? Il en va de même pour un reportage dans n’importe quel média, que ce soit la télévision, la radio, Internet ou la presse écrite au Québec.

Avez-vous été traité injustement par un média ? Ou croyez-vous qu’un média manque de rigueur et d’impartialité dans un reportage ou dans la façon de traiter un sujet ?

Le Conseil de presse du Québec est un organisme créé par le gouvernement québécois pour recevoir les plaintes du public et utiliser d’abord la médiation, puis la persuasion morale, pour les résoudre.

La première étape consiste pour vous ou quiconque n’est pas satisfait de l’équité ou de l’exactitude d’un article ou d’un rapport de déposer une plainte. Les consignes sont sur le site du Conseil de presse, à conseildepresse.qc.ca/porter-plainte/processus-de-plainte/.

Plaignez-vous !

Le Conseil a besoin d’une plainte pour agir. Il accepte les plaintes en français, en anglais et dans d’autres langues, selon la langue du rapport original, déclare le président du Conseil, Pierre-Paul Noreau, lui-même un ancien journaliste de la presse écrite à La Tuque, Ottawa et Québec. Si l’article que vous n’avez pas aimé est dans le Corriere Italiano, vous pouvez déposer votre plainte en italien, et elle sera traitée !

Vous ne pouvez pas porter plainte simplement parce que vous n’êtes pas d’accord avec le journaliste. Les plaintes portent sur les normes et pratiques journalistiques. Et vous ne pouvez pas intenter une action en justice et porter plainte auprès du Conseil en même temps – si la diffamation de votre réputation est en jeu, elle doit passer par les tribunaux, selon M. Noreau.

Vous n’avez qu’un mois pour porter plainte, après la date de publication d’un article ou de la diffusion d’un reportage ou d’une émission. Pourtant, « si le délai est échu et que le plaignant soumet une demande de prolongation pour des circonstances exceptionnelles, le Conseil évaluera la demande » selon Mme Caroline Locher, secrétaire générale du Conseil.

Manque de pouvoir

M. Noreau et son organisme ne possèdent aucun pouvoir judiciaire ou réglementaire. Ils veulent susciter une réflexion sur la déontologie journalistique. Les journalistes, précisent M. Noreau, ont un « rôle de chien de garde de l’intérêt public. »

Alors, qu’est-ce que la déontologie ? La racine du mot vient du grec deon, qui signifie devoir. Ce sont les obligations liées au travail, à la pratique d’une profession (ex : avocats, policiers…).

Sur leur site-web, le Conseil nous offre leur guide très complet sur la déontologie journalistique. Plusieurs points de ce guide sont de sens commun : Ne pas exagérer ; ne pas plagier ; ne pas faire de discrimination ; être équitable, être respectueux… Selon les normes de leur profession, les journalistes et les médias d’information produisent de l’information possédant les qualités suivantes :
· Exactitude : fidélité à la réalité ;
· Impartialité : absence de parti pris en faveur d’un point de vue particulier ;
· Équilibre : présentation d’une juste pondération du point de vue des parties en présence ;
· Complétude : présentation des éléments essentiels à sa bonne compréhension, tout en respectant la liberté éditoriale du média.

Il est aussi important qu’une opinion ne soit pas présentée comme un fait, pour ne pas induire le public en erreur ; et qu’un reportage rapporte les faits dans l’intérêt public, de manière impartiale.

Pièges

Deux des dangers que les médias régionaux doivent éviter, selon M. Noreau, sont de mélanger les publicités et l’éditorial, et de faire plaisir aux amis qu’ils croisent dans leurs communautés régulièrement. Pourtant, « les petits médias et les grands médias ont les mêmes devoirs envers le public, » souligne M. Noreau. Ces petits médias n’ont pas nécessairement des personnes formées en journalisme, en effet, plusieurs membres du personnel sont souvent bénévoles – donc c’est la responsabilité des gestionnaires de s’assurer que les normes soient maintenues dans leurs médias.

Reflet de Société est membre du Conseil de presse, ainsi qu’une grande majorité des médias québécois. En revanche les médias de Québecor, comme le Journal de Montréal et le Journal de Québec ainsi que TVA, ne le sont pas. Néanmoins, vous pouvez vous plaindre de leur façon de traiter des histoires qu’ils diffusent et publient.

Insatisfaits des décisions rendues contre certaines de leurs pratiques journalistiques, Québécor a tenté de les contester devant les tribunaux, remettant en cause la capacité et la légitimité qu’a le Conseil de presse d’offrir des opinions sur leurs reportages et leurs articles.

Mais les tribunaux sont très clairs sur le fait que le Conseil de presse a droit à la liberté d’expression et, à ce titre, peut statuer sur la diffusion de tout média partout au Québec, même des médias qui ne sont pas membres.

Fiabilité ?

Les reportages des médias sont-ils plus fiables qu’il y a 20 ans ?

Selon M. Noreau : « La montée en puissance des réseaux sociaux et le partage facilité de l’information au cours des 20 dernières années a stimulé le phénomène de la manipulation de l’information. Il y a en effet eu l’arrivée sur la scène de certains médias plus intéressés à faire de l’activisme au soutien d’une cause ou d’une idée, que de produire de l’information de qualité. En ce sens-là, je considère personnellement qu’il y a eu une certaine détérioration de la qualité de l’information offerte aux citoyens. »

« Mais, » poursuit-il « les attaques contre les médias d’information dits traditionnels et la méfiance que cela a suscité auprès d’une partie de la population ont, en contrepartie, suscité une réaction positive. Dans la grande majorité des salles de rédaction où travaillent des journalistes intéressés à servir l’intérêt public, il y a eu une préoccupation encore plus grande pour le travail de qualité, respectueux de la déontologie. Il y a donc eu amélioration des pratiques journalistiques au cours des dernières années. »

Sur le plan international, des nouvelles certifications de qualité comme le Journalism Trust Initiative et le Trust Project aident plus de trois milliards de personnes à évaluer facilement l’intégrité des actualités dans le monde. Ils établissent des normes pour les médias mondiaux, en particulier ceux en ligne. Selon M. Noreau, elles sont « le reflet de ce souci de respecter des règles de pratique encore plus exigeantes pour regagner la confiance du public. »

Délais

En 2022, le Conseil de presse du Québec a reçu 470 plaintes, dont 230 dossiers ont été ouverts pour étude. Chaque dossier peut contenir plusieurs plaintes visant un même produit journalistique.

Les délais de traitement pour les dossiers en 2022 ont été de 14 mois en moyenne. C’est long d’attendre un résultat ! Heureusement, le Conseil dit qu’il travaille activement à réduire ces délais pour 2023. Les décisions sont affichées sur le site web du Conseil pour que tout le monde puisse les voir.


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