Les cuisines collectives

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Par Colin McGregor

Dossier Santé

L’insécurité alimentaire est un phénomène de plus en plus présent. Avec l’inflation des prix dans les supermarchés, plusieurs se sont intéressés aux cuisines collectives. Le principe derrière les 1200 cuisines collectives du Québec est simple : les participants partagent les coûts de la nourriture et le travail de préparation des repas afin de profiter des réductions des coûts. Un excellent moyen pour reprendre du pouvoir sur son alimentation dans la dignité, l’entraide et la bienveillance. 

Le mouvement a vu le jour en 1982 au Québec dans le quartier d’Hochelaga-Maisonneuve. Le Carrefour familial Hochelaga-Maisonneuve et La Marie-Debout participent à structurer La Cuisine Collective Hochelaga-Maisonneuve (CCHM) qui deviendra la plus grande de la province. Le projet fera boule de neige. En 1990, avec plus d’une centaine de groupes de cuisine collective, le Regroupement des cuisines collectives du Québec est créé.

Benoist De Peyrelongue, directeur-général du CCHM, explique l’impact que la pandémie a eu sur son organisme : « Ce n’est pas nouveau, c’est comme si le début de la pandémie avait réveillé la conscience collective de la sécurité alimentaire. »

Benoist voit trois « indicateurs rouges » dans notre situation actuelle : les prix qui augmentent; la pénurie de main-d’œuvre et le sous-financement des organismes communautaires. Un très mauvais cocktail, dit-il.

Formation

En plus des personnes qui préparent leurs propres repas sur place avec l’aide du personnel de la CCHM, plusieurs sont en formation comme traiteurs ou cuisiniers. Cet apprentissage mène à des emplois dans la communauté : « Les participants doivent être dans un vrai milieu de travail », dit Benoist. Chaque six mois, CCHM forme 41 personnes et les place à la fin de leur parcours dans des entreprises et des organismes. Ils sont suivis pendant deux ans après l’insertion.

La cuisine des groupes est faite en fonction des besoins de chaque personne. « Quelques membres des groupes sont tout seuls chez eux, d’autres ont cinq ou six personnes à la maison à nourrir. Certains sont végétariens. Il y a un gros débat. On prépare les plats, ensuite on répartit le coût de la recette. Et chacun part avec ses repas », ajoute Benoist. Le coût moyen des repas varie de 0,70 $ à 1,10 $. Quelques groupes passent jusqu’à trois ou quatre heures à la CCHM. Certains viennent une fois par semaine, d’autres tous les 15 jours, et d’autres une fois par mois. La CCHM est toujours en position de pouvoir fournir quelques ingrédients gratuits chaque semaine pour chaque groupe.

Pour tout le monde

Elle a accès à des produits de qualité, souvent des produits locaux. La CCHM achète en gros. Elle bénéficie aussi de la générosité charitable d’organismes comme Moisson Montréal. Elle forme aussi des partenariats avec des producteurs afin d’obtenir des aliments. Entre les dons, les grossistes, des membres de la communauté qui donnent, ils sont capables de se débrouiller.

Une cuisine collective sert ceux qui sont en difficulté, mais aussi toute personne qui veut participer. « C’est pour tout le monde », dit Benoist. « C’est une mixité sociale. C’est une richesse. Chacun vient pour des raisons différentes. Il y a ceux qui souffrent de problèmes de santé mentale, des mamans monoparentales, des étudiants… Ça devient un moment qui leur appartient, ça devient un partage. On parle de tout… »

La CCHM de Benoist déborde de nouveaux projets, comme un toit potager. Ce qui permet de produire des légumes, et qui permet d’accueillir des élèves, des groupes en pré-employabilité, des groupes en santé mentale. Cela crée des occasions pour des enfants d’apprendre la cuisine et le jardinage, ainsi que d’avoir un petit magasin où les familles peuvent obtenir des mets à bon prix, ou gratuitement.

On peut trouver des toits potagers et des potages ailleurs dans la métropole, ainsi que la gestion d’une cafétéria, grâce à des donateurs comme la CSN et la SAQ, qui ont offert des terrains et d’autres formes d’aide. Aujourd’hui, ç’a permis à la CCHM d’engager cinq horticulteurs pendant l’été, de créer des services de traiteur, de fournir des paniers de saison et d’ouvrir une épicerie en ligne pour financer leurs autres activités.

24 tonnes de nourriture

« La COVID nous a appris la place qu’on a dans la communauté », dit Benoist. Ils ont fermé tous leurs services au début de la pandémie, mais très vite, ils ont appris qu’ils sont un service essentiel. Ils ont rappelé leur personnel aux cuisines, et pendant deux ans, ils ont livré la sécurité alimentaire aux portes des gens jusqu’à Tétraultville. « On a livré 200 000 repas, 24 tonnes de nourriture. » Une quarantaine de vélos de Cyclistes Solidaires leur ont aidés pour la livraison.

En période de COVID, ils ne passaient pas plus de cinq minutes à chaque porte, mais la distribution de mini sacs « a donné accès à la population », dit-il. De cette façon, ils pouvaient déterminer s’il y avait un besoin médical, un cas de violence conjugale, etc. « Mon rêve », dit Benoist, « c’est que les gamins des écoles du quartier puissent manger les légumes du quartier. » Les 1200 cuisines collectives font leur possible afin d’aider les Québécois dans notre ère d’inflation.

On définit les cuisines collectives comme « un milieu privilégié d’éducation populaire. » Les valeurs partagées sont: la solidarité; la démocratie; l’équité; la justice sociale; l’autonomie; la prise en charge; le respect de la personne; la dignité…


Les cuisines collectives du Québec font leur possible afin d’aider les Québécois dans notre ère commune d’inflation.

Les cuisines collectives

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