Depuis quelques années, nous pouvons observer un intérêt grandissant pour la littérature LGBTQ+ dans le monde, mais aussi au Québec. Passant par des écrivains américains comme Adam Silvera à des auteurs québécois comme Samuel Champagne, la littérature LGBTQ+ a su faire sa place. Les auteurs ont donné, à ce genre de littérature, la possibilité de toucher les jeunes et les adultes de la communauté, mais aussi toute autre personne passionnée par la littérature.
Un texte de Lewis Gagnon
Le 15 juin 2022, Reflet de Société a eu la chance d’avoir une table ronde sur la littérature LGBTQ+ afin de célébrer le mois de la fierté. Pour cet événement, trois panélistes ont été invités à partager leur expérience et leur opinion à ce sujet.
Notre premier panéliste est Samuel Champagne, un auteur qui se spécialise en littérature jeunesse LGBTQ+. Samuel s’est toujours intéressé aux histoires qui sortent de l’ordinaire. Ses histoires touchent notre sensibilité et permettent à tous de comprendre et d’accepter la complexité de l’humain que nous sommes. Il a étudié sept ans à l’Université Laval sur la littérature LGBTQ+, spécialement sur l’entrée du placard, puisque toute personne qui sort du placard doit y entrer d’une certaine façon.
La deuxième panéliste est Delphine Sifa Kamizire, une intervenante du projet littérature chez Jeunesse IDEM, un organisme de Gatineau qui vise à améliorer la qualité de vie des jeunes de 14 à 25 ans gais, lesbiennes, bisexuels-les, transgenres, transsexuels-les et en questionnement. L’organisme a pour but aussi de sensibiliser la population de la région de l’Outaouais face aux réalités de la diversité des orientations et des identités sexuelles. Elle s’est penchée notamment sur les conséquences que la COVID ont apportées chez les jeunes. Certains se sont retrouvés enfermés chez eux sans possibilité de s’épanouir de leur identité. Ils étaient enfermés tout le temps avec des parents dont la réaction face à leur identité de genre pourrait causer problème, il n’avait plus de safespace.
Notre dernier panéliste, Denis-Martin Chabot, est un auteur, journaliste, comédien ainsi que directeur de Fierté Littéraire, un organisme dont la vocation est de célébrer la littérature « queer ». Se spécialisant dans la littérature pour adulte, il a six romans dans son répertoire qui ont gagné plusieurs prix. En été 2022, Denis-Martin et Fierté Littéraire ont créé un concours en collaboration avec Fierté Montréal afin de trouver de nouveaux écrivains de la communauté. Le grand gagnant recevra un contrat d’édition chez les Éditions TNT.
Connaissances et expériences
Pour commencer la table ronde, nous avons demandé à nos panélistes de nous partager leur expérience avec la littérature LGBTQ+ et ce que ç’a changé dans leur vie. Samuel a commencé par nous dire : « Après 15 ans à étudier ou écrire de la littérature LGBT, je me suis découvert, j’ai découvert plein de trous dans cette littérature là. » Lors de ses débuts, Samuel a vite compris que la littérature adolescente québécoise n’était pas très diversifié. Lorsqu’ils faisaient des recherches, il ne trouvait que son nom. De plus en plus, il voit de nouveaux noms apparaître et remarque plus de diversité. Pour lui, la littérature LGBTQ+, c’est d’apprendre sur l’être humain, de comprendre les identités de genre et du même coup aider les jeunes à s’identifier.
Du côté de Denis-Martin, il a été beaucoup plus dur de mettre la main sur des romans LGBTQ+ dans son jeune temps. Maintenant approchant de la soixantaine, à part des romans du Gai savoir de Michel Tremblay, il n’avait pas vraiment d’auteur qui écrivait à ce sujet. C’est pour cette raison que Denis-Martin a commencé à écrire, il voulait écrire les histoires qu’il voulait lire, se reconnaître dans les personnages. Il a toujours eu un peu de difficultés à identifier ses romans comme « gay ». Pour lui, ses romans sont d’autant plus intéressants qu’un roman avec des personnages hétérosexuels qu’il va lire. Il nous partage que pour lui écrire est une sorte de coming out, non seulement du genre mais aussi de qui tu es, transposé tes émotions. Il nous partage aussi une phrase qu’il aime particulièrement : « on écrit pour soi, on publie pour les autres »
Delphine, de son côté, s’est donné comme défi depuis 1 an de se jeter dans la littérature LGBTQ+ pour son travail. Puisqu’elle côtoie plusieurs jeunes de la communauté chaque jour, pour elle c’était une façon d’apprendre afin de ne pas donner de mauvaises informations. Elle crée avec ses jeunes un milieu d’éducation autant pour eux mais pour elle aussi de s’informer sur les différentes identités de la communauté. Elle reconnaît aussi la force des auteurs de partager les histoires qu’elle a pu lire. Elle nous partage sur ce sujet : « notre imagination est toujours nourrie par quelque chose, notre imagination est nourrit par les histoire qu’on entends au alentour, on peut dramatiser ou minimiser les faits, mais ça vient de quelque part. » De lire sur des sujets plus ouverts, ça lui donne espoir pour les générations futures.
Ouvrir les horizons
Pour Delphine, une chose qui est importante et qui aiderait la croissance de la littérature LGBTQ+ au Québec, serait d’offrir des livres pour tout âge. Dès l’âge de 4-5 ans, l’enfant est assez vieux pour comprendre qu’il a des couples homosexuels, sans aborder la sexualité. De montrer à son enfant qu’une certaine identification de genre existe pour l’éduquer le plus jeune possible, de laisser le jeune poser ses questions sans que ça devienne maladroit.
Dans son travail, elle a contacté certaines bibliothèques et professeurs afin de proposer des œuvres LGBTQ+ afin d’ouvrir les possibilités aux jeunes qui cherchent à se découvrir. En apportant des livres directement aux professeurs, ils peuvent les utiliser directement dans leur programme et ainsi éduquer les jeunes que les parents peuvent être plus fermés aux activités qu’IDEM jeunesse et Gris Montréal peuvent donner dans les écoles. De plus, dans ses activités, les organismes vont plus parler de la sexualité et non de l’identité de genre. Delphine trouve qu’on sexualise trop la communauté ce qui apporte que les parents pensent qu’ils vont apprendre a leur enfant comment devenir gay.
Du côté de Denis-Martin, il apporte la problématique que les médias ne donnent pas beaucoup de place à la littérature. Il nous fait part de l’émission de radio Plus on est de fous, plus on lit! de Radio-Canada, mais il dénonce le fait que ce soit les mêmes personnes qui passent toujours, qu’il faut que tu sois dans la clique. Si la littérature en général est difficile, la littérature LGBTQ+ est encore moins diffusée dans les médias.
À ce sujet, Samuel ajoute qu’un t’abat est arrivé à quelques reprises, le meilleur vendeur du salon du livre était un livre de cuisine. Ce qui le désole est le pouvoir que la littérature sur des sujets plus tabou peuvent avoir sur la vie de quelqu’un et de voir le manque de promotions de ceux-ci. Pour lui, la littérature est une façon sécuritaire de rentrer dans la peau d’un personnage et de mieux comprendre son entourage, de mieux pouvoir aider ceux qu’on aime.
Un autre point qu’il ajoute est le manque de diversité dans notre diversité. Il montre le nombre minime de science-fiction, de bandes dessinées, d’album jeunesse, des personnes racisées et handicapé. On voit souvent des hommes blancs gay et même lui se trouve coupable de cette problématique. Il a plusieurs personnages secondaires diversifiés, mais à encore de la misère à les mettre en personnages principaux. Il croit qu’en se mettant ensemble, nous allons pouvoir arriver à quelque chose de mieux. Il dit qu’on est déjà au stade d’y penser, mais que nous n’avons pas franchi la marche tout à fait
Sujets Tabous
En parlant de la santé mentale et des problématiques dans la littérature LGBTQ+, Samuel apporte comme fait que les problématiques qu’on peut retrouver dans un livre est problématique réelle pour quelqu’un. Tu peux écrire une histoire complètement fictive et qui vient rejoindre totalement la vie d’un jeune. Il existe très peu de littérature pour adolescents avec des personnages qui vivent bien avec leur différence, que ce n’est pas la base de l’histoire, ce que Samuel trouve dommage. Pour avoir un plus grand cheminement de sa diversité, il faudrait plus se référer à des romans pour adultes, puisque l’adolescence est surtout une période d’adaptation et de compréhension.
Pour finir cette table ronde, nous avons demandé à nos panélistes de présenter une œuvre littéraire LGBTQ+ qui recommandait ou qu’il a fait du bien. Sur cette question, Samuel à parler des salons du livre qui ont eu un impact très positif sur sa vie. Il a pu suivre le cheminement de certaines personnes qui revenaient à chaque année depuis quelques années. Ils leur parlent de leur questionnement, l’année suivante reviennent avec une blonde, des avancements entre parents et enfants au cours les années. Il trouve ça très valorisant et lui donne le goût d’écrire toujours plus à la suite à ces évènements.
Toutes recommandations et autres livres à lire seront nommé plus bas. Pour visionner la vidéo complète de la table ronde, rendez-vous sur la page YouTube ou le site web de Reflet de Société.
Pour écouter la Table Ronde, cliquez ici.
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