Difficile d’y voir clair dans toute l’information qui nous est transmise depuis le fameux scandale d’utilisation frauduleuse des données privées de millions d’utilisateurs et utilisatrices de Facebook, dont près de 800 000 comptes au Canada seulement. Tentons de faire la lumière simplement.
Un texte de Martin Comeau – Dossier Internet
Facebook, comment ça marche ?
Facebook est gratuit, comme le moteur de recherche Google, pour ne nommer que cet autre exemple. Or ces deux géants pour vous livrer leur service utilisent pourtant des ressources humaines (les employés), mais aussi des ressources physiques, des serveurs (d’immenses ordinateurs) dont le rôle est de stocker et transmettre cette information entre les utilisateurs (vous) et leurs applications (Facebook, mais aussi dans notre autre exemple Google, votre compte Gmail, Google Photos, Google Maps, etc.)
Tout ceci a un coût. Ce qui est marchandé, pour vous offrir gratuitement ces services, ce sont vos informations personnelles. L’autre marchandise, c’est la publicité que vous acceptez de voir en utilisant ces plateformes.
Vos informations personnelles : La mine d’or
Pour arriver à convaincre les entreprises d’acheter de la publicité chez-eux, Facebook, et Google entre autres, offrent aux annonceurs de s’adresser aux personnes qui représentent le plus leurs clients potentiels. Pour y arriver, ils ont en poche sur leurs serveurs votre âge, votre genre, si vous êtes ou non célibataire, votre lieu de résidence, le nombre d’enfants que vous avez, vos déplacements, etc. C’est ce “etc” qui vaut le plus cher.
Certains annoncent leur grossesse, leur mariage éminent, la voiture qui vient de briser, les dettes qui s’accumulent, le projet de quitter un emploi, d’en rechercher un nouveau, bref, nos statuts Facebook ou nos recherches sur Google nourrissent une bête qui au fil des jours vous passe au peigne fin. Elle vous connait mieux que plusieurs de vos amis-es ? Vous peinez à croire ?
Qui de vos amis-es sait le contenu de vos messages privés sur Facebook, de vos recherches sur des sites pas toujours recommandables, de vos confidences par courriel, de vos recherches de syndic de faillite ? Ces deux géants, Facebook et Google, eux le savent. C’est pourquoi après avoir fait une recherche, par un hasard qui n’en est pas du tout un, vous voyez de la publicité de couches pour bébé, de carte de crédit Capital One, d’une rutilente nouvelle voiture ou encore de … site de rencontre.
Est-ce que ceci est légal ?
La barrière est aussi mince que floue entre vos droits à la vie privée et votre consentement à les partager quand vous vous inscrivez sur un site Internet. Avouons-le, nous ne lisons pas les termes et conditions avant de dire “oui je le veux” à Facebook, Google, et tous les autres géants, dont Microsoft quand vous installez Windows. En clair, il y a un certain nombre de lois qui se chevauchent sur le sujet, allant de celles qui régissent le droit international à la charte constitutionnelle canadienne et québécoise, en passant par votre droit à la réputation et celui de la vie privée. Et je fais court. En clair, tous s’entendent pour dire que le flou, le brouillard est si dense qu’une chatte y perdrait sa portée dans la même boite. C’est dire.
Mais quoi comprendre du scandale Facebook, comment est-ce possible ?
Quand vous vous inscrivez sur un site ou un autre, allant d’un média connu comme Radio-Canada en passant par un douteux site de rencontre, vous avez souvent la possibilité de vous abonner en utilisant “facebook” ou “google” pour créer votre compte sur ces sites tiers. C’est ici que commence l’attrape. Un échange se fait de données, aux conditions souvent incompréhensibles, entre votre comportement sur ces sites et Facebook ou Google. Ainsi, on tente de vous dire que ces “mariages” sont pour votre meilleure expérience, mais dans le cas du scandale du printemps 2018 avec Cambridge Analytica, ces “mariages” ont été utilisées contre le consentement des usagers pour “profiler” leur identité et tenter d’influencer, par votre truchement, la campagne électorale américaine (et quelle autre encore ?).
Cette explication comporte pas mal de raccourcis, mais elle vous fait le portrait qu’il vous faut savoir. Chaque fois où vous jouez à un jeu et que vous utilisez la “connexion avec Facebook”, vos informations personnelles, à plus ou moins grande échelle, se mettent à circuler dans des mains qui vous sont complètement étrangères. Seulement deux clics vous séparent de ce fait : “J’accepte les conditions” et “Connectez-vous avec Facebook”.
Lors du “ménage” des applications qui échangeaient des informations entre Facebook et mon compte sur plusieurs sites, j’en ai eu pour 250 entités différentes, allant du journal Le Devoir à Microsoft, en passant par Kijiji et j’en passe. Leurs “droits de regard” sur mes informations allaient de mon positionnement géolocalisée (la fameuse activation de position de votre appareil) en passant par l’autorisation à mes images, mon micro, etc.
Comment me protéger maintenant ?
La règle numéro 1 et la plus sûre sera toujours de ne pas avoir de compte Facebook ou autre de ces géants qui font leur cote boursière en revendant ou en marchandant votre profil et vos informations privées. Mais je sais, vous me direz qu’il faut bien être de son siècle, alors voici des recommandations plus accessibles.
- Allez consulter ce que Google sait de vous. En un clic, vous pourrez voir ce que vous donnez comme nourriture à la bête. (Voir votre activité sur Google) ;
- Suivre ce mode d’emploi pour sécuriser Facebook (source : Voici comment faire pour protéger vos données personnelles sur Facebook, Journal de Montréal – site consulté le 28 avril 2018) ;
- Utilisez un navigateur web costaud pour visiter les sites Internet, je suggère Brave qui a toute ma confiance, ou presque ;
- Lorsque vous vous abonnez à un site Internet, évitez l’option facile de le faire avec un clic “M’enregistrer avec Facebook” ou Google ou autre. Quand c’est possible, faites-le avec votre adresse de courriel personnelle et votre propre mot de passe ;
- Quand la géolocalisation de votre téléphone ou tablette (voire votre ordinateur portable ou de table) n’est pas utile pour vos activités, désactivez-la ;
- Tenez-vous informé-e. Prenez le temps de lire les conditions avant de dire “oui je le veux”. Vous êtes la personne la mieux placée pour vous protéger. Avez-vous besoin que toutes vos photos soient sur les serveurs de Google Photos ? Vraiment ? La question “en ai-je vraiment besoin ?” est la meilleure à se poser avant de “transférer” passivement de l’information ;
- Publiez moins et révisez davantage ce que vous avez partagé. Avez-vous envie que toutes ces photos et statuts vous définissent ?
- Trouvez des façons alternatives pour vous informer avant de faire un achat (le bon vieux coup de téléphone au magasin du coin fonctionne encore et est moins intrusif que Google) ;
- Pensez à vos amies et amis. Votre vie privée n’est pas mieux protégée que par le plus faible de vos contacts, ceux qui vous “taguent” dans une photo pour seul exemple. Reprenez en main votre confidentialité comme il vous semble juste de le faire ;
- Rappelez-vous que “Si c’est gratuit, vous êtes le produit. (le petit court-métrage ci-dessous l’explique si bien !)