Une chronique de Florence V.Savoie et Estelle Cazelais, sexologues – Dossier Sexualité
Qu’est-ce que c’est, un sexto?
Il existe plusieurs formes de sextos. Il est possible d’envoyer des messages, des images ou des vidéos à caractère sexuel. La plupart du temps, on envoie les sextos via un cellulaire à l’aide d’applications : SMS, Facebook Messenger, Instagram, Snapchat, WhatsApp, etc. On séduit et on est séduit en retour à l’aide de ces nouvelles technologies de l’information; c’est merveilleux! C’est génial pour explorer sa sexualité, ses limites personnelles et sa confiance en l’autre. Par contre, bien malheureusement, certaines personnes n’utilisent pas positivement cet échange. Certaines personnes utilisent les sextos à des fins de chantage, d’exploitation et même de harcèlement.
Comment utilise-t-on les sextos quand on est adolescent-e-s?
Chères adolescentes et chers adolescents, sachez qu’il est, à ce jour, illégal pour vous d’envoyer des images et des vidéos à caractère intime à d’autres personnes, adolescentes ou adultes, et que ces vidéos soient partagées par Snapchat (un média sur lequel les photos ne restent, en théorie, que 10 secondes!) ou quelque autre média!
Si les adultes peuvent quant à eux partager des images ou vidéos intimes d’eux-mêmes, les adolescents n’ont pas ce même droit, et le partage d’images intimes de personnes mineures (que ce soit deux mineurs qui s’envoient des photos ou un mineur qui envoie ses photos à un adulte) est considéré comme de la production et du partage de pornographie juvénile! Ça semble bien sérieux lorsqu’on en parle comme ça, et ça l’est!
Les adolescents ont néanmoins le droit de s‘envoyer des messages écrits à caractère sexuel. Il faut cependant s’assurer que les deux partenaires aient bien consenti. Hé oui, le consentement, c’est partout, tout le temps!
Le double standard d’être exposed.
Le groupe d’amis de Mathéo partage les photos intimes que Camilia lui a envoyées. Ils les envoient par Snapchat à d’autres élèves de leur école.
Se faire « exposer », c’est quand une autre personne partage nos messages, photos ou vidéos intimes sans notre consentement. C’est un geste violent! Malheureusement, ce geste est trop souvent perçu différemment selon le sexe de la victime.
En bref, quand une fille se fait exposer, elle perd son statut d’innocence et de bonne fille. Ses amies peuvent la rejeter, ses parents vont être choqués en ayant certaines réactions comme « on pensait jamais que notre fille ferait ça! »
On la perçoit désormais négativement! C’est le paradoxe classique de la vierge et de la putain. Alors qu’en fait, elle apprenait à faire confiance à une autre personne en testant ses limites, c’est SA confiance qui a été brisée, et c’est envers elle qu’un immense manque de respect a été commis.
L’adolescent qui est exposé, lui, est perçu comme un bouffon! On mettra de l’avant ses qualités de mâle avec un grand M. Eh! un gars qui ose, qui est aventureux! Et puis, de toute façon les gars, surtout à l’adolescence, ça ne pense qu’au sexe (sentez-vous le sarcasme?)… Alors qu’en vrai, les filles comme les gars peuvent vivre de la détresse psychologique suite à ce genre d’événement, celle-ci sera particulièrement banalisée chez les garçons et les jeunes hommes!
Quelles sont les responsabilités des écoles quand des élèves commettent des délits les uns envers les autres ?
- Faire de la prévention pour éviter que ce type de comportement se produise : ateliers, conférences avec des experts : les sexologues!
- Se doter d’une politique contre les violences sexuelles: oui, c’est de la violence sexuelle!
- Réfléchir à qui vit les conséquences des actes : les agresseurs ou les victimes des actes criminels commis ?
- Reconnaître que ce sont les victimes qui vivent les conséquences et agir en ce sens : punir, suspendre ou même expulser les agresseurs. Le droit des victimes à s’instruire dans un environnement sécuritaire devrait prévaloir sur celui des agresseurs.
- Cesser de justifier les comportements des agresseurs (« Elles ont envoyé les photos », « Elles étaient habillées sexy ») et protéger les victimes.
Enfin, vive la culture du consentement! Parce que le consentement devrait se demander, partout, tout le temps, même en ligne et dans les applications virtuelles, qu’on soit adulte ou adolescent!