Sur les bancs des écoles

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Par Raymond Viger | Dossier Éducation

Pourquoi les écoles ne sont plus situées dans les quartiers ? Pourquoi les avoir remplacées par des écoles de 2 500 élèves ?

Avec des écoles de proximité les enfants vont à l’école à pied. Moins de transport en autobus scolaire. Moins d’obésité pour les jeunes. Le jeune arrive ainsi à l’école dans un meilleur état d’âme et mieux disposé à suivre ses cours. Après une heure en autobus, pas surprenant que le jeune ait besoin de bouger et de sauter partout. Va-t-on lui ajouter une prescription de Ritaline pour le calmer ? Une petite école peut plus facilement être réaffectée dans d’autres fonctions si elle devient moins nécessaire pour un quartier donné.

Les administrations scolaires créent des mégas écoles pour répondre aux ratios imposés par le ministère de l’Éducation pour obtenir les budgets pour offrir les services spécialisés pour accompagner les jeunes. Cela les oblige à regrouper dans la même école des jeunes d’un plus grand secteur, forçant l’usage des autobus scolaires. La dévitalisation des villages tue les petites écoles.

Une communauté doit pouvoir intégrer ses jeunes, ses personnes âgées, ses personnes vivant avec un handicap physique ou mental… Toutes ces personnes qui sont différentes et qui ont des besoins différents. L’harmonie est un équilibre entre tous ces extrêmes. Une société ne peut vivre en paix si elle délaisse une partie de ses citoyens.

Le sentiment d’appartenance à la vie de quartier permet une meilleure intégration de ses habitants qui ne sont plus des gens anonymes limités au métro-boulot-dodo.

Combattre la pauvreté

Une métropole ne peut fermer les yeux sur la pauvreté qui peut devenir un cancer qui ronge sa communauté. Un conflit est alors généré entre deux mondes qui s’affrontent : les riches qui veulent des services, leur qualité de vie, et des pauvres qui ne demandent qu’à rester en vie.

On peut se limiter à embellir un quartier, à rénover les immeubles, à augmenter le nombre de logements, en tassant la pauvreté toujours un peu plus loin. Mais comment la vaincre ?

J’ai connu un entrepreneur qui a fait beaucoup d’argent et qui vivait très bien. Il n’avait qu’une 2e année. Habile de ses mains, il a construit des maisons toute sa vie. Il m’avoua un jour que s’il avait été né une vingtaine d’années plus tard, il lui aurait été impossible de faire la carrière qu’il a faite. Parce qu’il lui aurait alors fallu toutes sortes de diplômes afin d’obtenir des cartes et des permis pour planter un clou dans une planche de bois. Avec sa 2e année, il serait possiblement pauvre et itinérant. On exige au minimum un Secondaire 3 pour avoir accès à des cours sur les métiers de la construction. Certaines études exigent même le Secondaire 5.

Selon certains, l’école n’est pas adaptée pour accueillir des gens qui apprennent différemment. Certains y arrivent, marteau à la main, en observant et en suivant des gens plus expérimentés. Pour eux, c’est en se brisant les doigts d’un coup de marteau qu’on apprend à devenir ébéniste ! Qu’est-ce qui est le plus important ? Un diplôme ou une autonomie professionnelle ?

Est-ce qu’une des causes de la pauvreté est d’empêcher des gens qui apprennent différemment d’avoir accès à un métier plus rapidement ? Comment pourrions-nous pratiquer le plein emploi si certains jeunes n’y ont pas accès ? N’est-ce pas le rôle des institutions scolaires de s’adapter aux jeunes dont elles ont la responsabilité d’instruire et d’éduquer ?

Les institutions scolaires devraient-elles changer leur vision de l’éducation et leur façon de faire ? Les écoles devraient-elles prendre exemple sur les écoles alternatives ? Un établissement de quartier avec une plus grande autonomie pour créer et appliquer le programme en fonction des besoins des jeunes. Ces écoles exigent la contribution de la communauté qui s’implique auprès de ses jeunes. Parce que ça prend un village pour éduquer un jeune.

Au primaire, les enseignants sont des adultes significatifs qui restent auprès des mêmes jeunes pendant plusieurs années. Une façon d’établir une relation solide entre enseignants et élèves.

L’enseignement et ses limites

L’enseignement nécessite une flamme sacrée, une passion. Il est primordial de soutenir ces adultes dans leur mission. Leur rôle est essentiel.

Lorsqu’un enseignant a atteint son point de saturation, ne devrait-on pas l’aider à se reclasser ? Il faut éviter qu’ils continuent à enseigner seulement pour conserver leur sécurité d’emploi et toucher leur retraite. Un professeur déprimé ne peut plus être un adulte significatif pour un jeune. Il devient un grain de sable dans la grande roue de l’éducation. Il est possiblement préférable de le transférer vers un autre emploi où il pourra s’épanouir et demeurer significatif d’une autre façon.

Un pilote d’avion professionnel doit passer des examens de perfectionnement et des examens médicaux à tous les six mois pour conserver son poste de travail. Parce qu’il a la responsabilité de vies humaines, nous voulons que le pilote ait toutes ses facultés et compétences pour arriver à destination.

Pourquoi ne pas faire de même avec nos enseignants ? Devrions-nous créer un ordre professionnel pour encadrer ce métier ? On dit que c’est en enseignant que l’on devient bon. Nous perdons 50 % de nos enseignants dans les 5 premières années de leur entrée en fonction.

L’objectif d’une société est de veiller à la scolarisation des jeunes, de leur fournir les outils nécessaires pour qu’ils puissent devenir des citoyens heureux. La scolarisation peut se faire par l’observation, par des essais et erreurs. L’école doit s’adapter aux jeunes, dans toutes leurs différences.

Autant l’environnement doit être différent pour les jeunes qui ont des besoins particuliers, autant il doit l’être pour les premiers de classe. Ralentir un premier de classe dans son apprentissage équivaut aussi à un suicide scolaire. Un premier de classe ne veut pas fonctionner à 75 %. Il veut apprendre à 120 %… minimum. Le décrochage n’est pas juste le cas du dernier de la classe qui ne réussit pas à suivre. C’est aussi le premier de classe qui ne parvient pas à attendre les autres.

La pandémie nous a fait expérimenter l’école à domicile avec des cours en visioconférence. Est-ce une alternative aux grandes écoles ? Une façon de faire autrement pour conserver l’éducation de nos jeunes dans leurs villages ?

  • Ce texte est un extrait du livre Regard vers le futur, publié aux Éditions TNT.

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Raymond Viger
Raymond Vigerhttps://raymondviger.wordpress.com/
Raymond Viger. Rédacteur en chef du magazine d'information et de sensibilisation Reflet de Société, édité par le groupe communautaire Le Journal de la Rue. Écrivain, journaliste et intervenant. raymondviger.wordpress.com www.refletdesociete.com www.cafegraffiti.net www.editionstnt.com www.survivre.social Courriel: raymondviger@hotmail.com

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