Portrait : Jean Sok – Hourth
Par Équipe Reflet de Société
Jean Sok, dit « B-Boy Hourth », était sur la scène de la Maison de la culture Maisonneuve cette année. Amputé d’une jambe, breakdancer professionnel, il a redéfini le possible pendant le spectacle et au-delà de celui-ci. Avec ILL-Abilities, ce Français a transformé l’usage des béquilles en signature artistique, prouvant que l’obstacle est une force et la scène un territoire à conquérir.
Jean Sok est né en France. Perdre sa jambe à un âge encore incertain — parfois expliqué comme le début d’un combat contre le cancer — n’a jamais entamé sa volonté de danser. À l’âge de 15 ans, il découvre le breakdance. Son handicap devient alors son allié et il intègre des béquilles dans sa danse.
Sa notoriété prend un tournant majeur lorsqu’il rejoint la tournée du Cirque du Soleil — The Immortal World Tour, hommage à Michael Jackson. C’est là que sa performance dans une chorégraphie de Travis Payne bouleverse les attentes. Selon le blog Energetiks, le chorégraphe, touché aux larmes, aurait confié : « Il est exactement le type d’artiste que Michael aurait aimé inspirer… quand il danse, il est l’un des meilleurs sur scène ».
Sa présence au prestigieux Billboard Music Awards 2012, aux côtés de Cee Lo Green, confirme son statut d’exception. Connu pour déclencher l’enthousiasme immédiat, il impressionne par sa capacité à rivaliser avec tout autre danseur « valide ». Pour lui, la béquille n’est pas une béquille : c’est un outil d’excellence.
La béquille comme prolongement
Ce qui fascine chez Jean Sok, c’est l’usage de la béquille comme prolongement naturel. Il ne cherche pas à dissimuler son handicap. Il l’embrasse. Les béquilles deviennent cordes sensibles, axes de pivot, points d’équilibre dynamique.
Il témoigne : « Chaque fois que je veux un emploi, je passe l’audition comme une personne normale, car je ne me sens pas limité » ou encore « je n’ai jamais douté de pouvoir être danseur », déclarait-il à propos des défis qu’il a dû surmonter pour se professionnaliser.
De la rue aux grandes scènes
Jean Sok n’est pas seulement une présence scénique. Il est un mouvement. Ancien membre de la troupe, il a passé le relais à ILL-Abilities, collectif de danseurs unis dans la conviction que « Pas d’Excuses, Pas de Limites » est bien plus qu’un slogan.
Récemment, ILL-Abilities a représenté la culture hip hop à la cérémonie d’ouverture des Jeux paralympiques et olympiques, et dans les compétitions internationales de break, comme à Paris 2024.
Un symbole de l’art et de l’inclusion
Plus qu’un danseur, Jean Sok incarne un symbole. À travers ses performances, il montre que l’accessibilité n’est pas une concession, mais une source d’innovation. Il révèle à quel point le handicap peut générer de nouveaux langages artistiques — ici, dans le geste rocailleux des béquilles, dans la puissance du mouvement, dans la maîtrise du corps instable.
En mettant sa signature au service de l’esthétique et non du pitoyable, il réécrit la place des corps atypiques dans la culture, et contribue à déconstruire la figure rituelle du « handicapé courageux ». Pour lui, cette posture n’existe pas : il ne veut pas être admiré, il veut être vu — comme artiste.
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