MJ Falardeau | Dossier Culture
N’oublions jamais
Cicatrisé dans la pierre des monuments
qui commémorent le temps
comme une épitaphe cohésive
sur les cénotaphes de la mémoire collective
N’oublions jamais
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Slogan
d’une paix
n’existant
que l’instant
d’un entre-deux-guerres
un entretemps de deuil
le temps d’enterrer les cercueils
dans les recueils d’Histoire
Le temps de dater la guerre dans des livres
et de les classer dans les archives d’un temps
qu’on mémorisait en noir et blanc
comme si l’Histoire n’était plus qu’un dortoir
où coucher les mémoires
comme si les vieilles rancunes
dormaient dans un lit d’espoir
de ne plus se réveiller à la Une
des bulletins de nouvelles du soir
N’oublions jamais
l’épopée d’une paix
faufilée dans les failles de la diplomatie
piégée dans les mailles d’un filet impérialiste
où le monde n’est plus qu’une partie de Monopoly
Où le capital
achète les règles de l’hégémonie globale
et où la chance n’est que petite fortune de la loterie mondiale
Sur un échiquier
où les pions forts sont alliés du même côté
assis à la grande tablée du jeu des sociétés
pendant que le reste de la carte se fait étouffer
des nœuds de cravate des diplomates
G7 et mat
Et ONU crut à ces alliances pacifistes
OTAN continuer la partie de Risk
quitte à demander l’amnistie
quand l’amnésie internationale nous aura conquis,
car n’oublions jamais que la mémoire est une faculté qui oublie
Comme un devoir de mémoire mal apprit
un échec en Histoire tellement on n’a rien compris
on a vendu la paix pour le prix de simples regrets
des N’oublions jamais à rabais
parce qu’on rêvait de pacifier le monde avec des s’il vous plaît
Faire
comme si « dans le temps de la guerre »
était synonyme de « l’ancien temps »
Sans voir qu’aux nouvelles de dernière heure
l’Histoire est conjuguée au présent
qu’hier est en direct d’aujourd’hui
que c’est dans des images en couleurs
que la guerre gronde dans un ciel gris
dans une constellation de tisons étoilant la nuit
des averses de cendres incinérant des vies
Car la paix tombe en poussière
ensemençant les cimetières
d’une culture de guerre
trop de vies en terre
trop de morts en tête
Un champ de coquelicots
plein le cerveau
à cueillir des souvenirs invaincus
pendant que la paix fane à perte de vue
sur les champs de bataille du déjà-vu
Histoires vécues, du déjà-lu
Et ce n’est pas à copier-coller le passé
qu’on se fera auteurs de meilleures idées
plagier hier
ne fait qu’avancer le temps par en arrière
il faut arrêter d’écrire l’Histoire à l’envers
la paix ne devrait jamais finir en guerre
Mais l’harmonie des accords
se désaccorde (encore !)
au rythme d’un défilé militaire
qui défie les frontières
pour être récipiendaire d’un plus grand par terre
et se gagner une cour arrière
à un jeu de politique étrangère
Échec et mat
Et il ne restera plus qu’à commémorer la mort
et verser des remords
assis tranquilles dans notre Amérique du Nord
Pour qu’on grave une nouvelle fois le même slogan
N’oublions jamais
sur des monuments
qu’on plantera encore comme des croix
pour se faire accroire qu’on y croit :
N’oublions jamais
jusqu’à une prochaine fois…
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